Au lait de soja ou de vache, sans machine, de manière traditionnelle et délicieuse.

Depuis quelques mois, j’avais envie de faire du yogourt moi-même. Pour le fun, pour savoir le faire et aussi car c’est beaucoup économique et écologique. Je me souvenais aussi du bon goût du yogourt de ma grand-mère libanaise.

Pour démarrer à mon tour ma production de yogourts maison et être sûre de ne pas rater la fermentation, je prévoyais d’acheter une yaourtière ou un thermomètre pour pouvoir vérifier la température. Entre temps, j’ai été rendre visite à mon oncle qui vit aux Etats-Unis et j’ai découvert qu’il faisait son propre yogourt et sans machine! C’est tellement facile que je me demande pourquoi je ne m’y suis pas mise plus tôt.

Voici donc la recette de ma grand-mère transmise par mon oncle :

Matériel:

Une casserole

De la chaleur (feux de cuisson, four solaire, radiateur en hiver…)

Un bocal

Un chiffon en coton et un bonnet d’hiver comme sur les photos ou des pulls en laine. La laine est un isolant magnifiquement efficace

Optionnel: un thermomètre.

La recette traditionnelle proposée ici inclue simplement votre petit doigt, bien propre.

Yaourt de soja fermenté dans son bocal à conserver au frigo
Du yogurt de soja tout frais fait maison.

Ingrédients:

Du lait de soja (fonctionne aussi avec du lait de vache ou autre ruminant)

Des ferments au choix: du yogourt (de vache ou de soja) 2 cuillère à café ou une cuillère à soupe par litre de lait, une capsule de probiotiques, des ferments secs par exemple des ferments végans.

Recette:

  1. Chauffer le lait dans une casserole jusqu’à obtenir une température de 40-44 ºC degrés Celsius ou 112 ºF degrés Fahrenheit.
  2. Mélanger votre ferment avec un peu de ce lait à part directement dans le bocal.
  3. Ajouter le lait chaud (cela va mélanger la partie ferments avec tout le lait).
  4. Emballer le bocal bien au chaud dans des tissus en laine de préférence ou autre matière qui tient chaud.
  5. Laisser reposer au chaud (38 à 43 degrés) sans toucher pendant 5 à 12 heures, 7 heures dans mon cas.
  6. Dégustez ou conserver au frigo pendant quelques jours.

Notes, détails:

La température de fermentation doit être entre 38 et 44 degrés. Lorsque vous verserez la préparation dans le bocal, elle perdra un peu de chaleur, il est donc bon de commencer avec une température suffisante, mais pas trop chaude pour ne pas tuer les bactéries de fermentation lactique (lactique ne veut pas dire de lait, c’est un type de fermentation, la choucroute est par exemple une lacto-fermentation, mais sans produits laitiers).

Pour mesurer la température sans thermomètre, mettez votre petit doigt propre dans le lait chaud et touillez en comptant jusqu’à 5 si vous êtes sensibles à la chaleur, comme moi, et jusqu’à 12 si vous êtes comme mon oncle. C’est le temps que nous pouvions laisser le doigt dans le même lait chaud avant de se brûler et la température était de 44 degrés.

Je pense que les hommes ont une température corporelle plus élevée donc peut-être que si vous êtes une femme vous garderez le doigt moins longtemps dans le lait à 44 degrés. L’idéal est d’avoir un thermomètre la première fois et de comptez combien de temps vous tenez dans le lait avant que ça brûle (vu que 44 est plus chaud que votre corps), enlevez votre doigt avant d’avoir mal, ne vous brûlez pas après avoir lu cet article, il est important de prendre ses précautions.

Une fois emballé, il ne faut plus toucher le bol, au risque de faire rater la fermentation du yogurt.

La préparation de lait chaud + ferments est tout d'abord placée dans un bocal
La préparation de lait chaud + ferments est versée dans un bocal suffisamment grand.
Le bocal est ensuite emballé dans un chiffon, ou un pull en laine
Le bocal est ensuite emballé dans un chiffon, ou un pull en laine
Pour finir, le bocal enchiffonné est entouré d'un bonnet, ou d'un second pull en laine. Ainsi, il restera chaud, entre 32 et 44 ºC pendant environ 7 heures. Il ne faut plus toucher le bol, au risque de faire rater la fermentation du yogurt.
Puis, le bocal enchiffonné est entouré d’un bonnet, ou d’un second pull en laine. Ainsi, il restera chaud pendant environ 7 heures.

Plus écologique et plus économique

Faire son yogourt à partir de briques de lait d’un litre permet d’une part de réduire les déchets plastique et carton et d’autre part cela permet de réduire les pertes – dans le film Wasted! il est expliqué que pour un litre de yogourt 3 litres de lait de vache sont utilisé, allez savoir pourquoi… –

Si on fait son lait végétal soi-même au lieu d’acheter des briques déjà prêtes, c’est encore plus économe et écologique, car avec une centaine de grammes de graines on fait 1 litre de lait (si vous regardez sur l’emballage des laits végétaux industriels, il y a environ 8% de soja, d’amandes ou autre. Le reste étant de l’eau, et parfois des émulsifiants ou autre). Conclusion, en faisant son lait soi-même, on fait des économies et on réduit donc le poids de nos courses: un kilo de graines fera 10 litres/kilo de yaourt.

Pour ma part, j’attends de trouver des grains de soja bio cultivés en Europe. Pour l’instant le lait de soja tout prêt avec marqué dessus “soja français” fait l’affaire.

Avantages du lait de soja

Le lait de soja donne un yogourt solide naturellement et sa saveur est très proche du yogourt de vache. Je l’aime beaucoup car je peux l’utiliser dans des muesli ou granola, ainsi que dans des recettes libanaises incluant du yogourt salé.

Le fait que le lait de soja se solidifie comme le lait de vache rend la fabrication du yogourt plus facile. Les autres laits – amandes, chanvre, noix de coco, cajou, etc – prennent un goût acidulé grâce à l’activité des bactéries, mais ils restent liquides, il faut alors leur ajouter de l’agar-agar, du caragean – parfois mal toléré – , de la poudre de graines de caroube ou autre.

Enfin, le soja est désormais cultivé dans la plupart des régions du monde, ce qui en fait potentiellement un produit local à peu près partout et une bonne alternative au lait de vache. Remplacer les produits issus des vaches est un moyen simple et très efficace de réduire notre empreinte écologique et de préserver les forêts car les vaches – à lait et à viande – occupent 66% des terres agricoles mondiales, et 24% du total des terres mondiales (chiffres FAO sur le site faostat).

Il y a moins de phytoeustrogènes dans le soja que dans les produits laitiers.

Le soja contient des hormones proches des œstrogènes humains et certains s’inquiètent de les consommer régulièrement. On peut imaginer toutes sortes de choses, on trouve sur le net des articles alarmants et des articles élogieux sur le soja. Moi, ce que je constate c’est qu’en Asie orientale (je veux dire par là à l’est de l’Inde) et du Sud-Est (Chine, Vietnam, Thailande, Laos, Cambodge,…) le soja est consommé tous les jours ou toutes les semaines, sous forme de tofu et de sauce soja, c’est à dire sous forme fermentée, comme le yogourt. Quand au lait de soja – non fermenté – il est également consommé régulièrement tel quel.

Résultat: les gens sont en bonne santé, en revanche ils ont de nouvelles maladies avec l’occidentalisation de leur alimentation. D’autre part, on peut ajouter que sans consommer de produits laitiers les asiatiques orientaux ne manquent pas non plus de calcium, voilà qui introduit la suite de mes réflexions.

Qu’en est-il du calcium?

Pour continuer à sortir de notre ethnocentrisme, notons qu’en Asie orientale, les produits laitiers ne font pas partie de l’alimentation habituelle et que les personnes ont en général de bonnes réserves de calcium et de bons os. Il paraît même qu’ils ont moins de fractures à un âge avancé. L’expérience de milliards de personnes, les asiatiques orientaux, montre donc que les produits laitiers ne sont pas nécessaires dans notre alimentation comme source de calcium. Cela, car le calcium est présent dans de nombreux aliments et parfaitement assimilable: amandes, orties, chou, brocoli, tahini (crème de sésame, ingrédient phare du hommos (recette ici),…Je peux témoigner de ma propre expérience puisque sans consommer de produits laitiers, mes analyses montrent un taux de calcium élevé! Je mange beaucoup de légumes et de noix, amandes, lin,…Chaque personne est évidemment différente et ce qui est valable pour moi ne l’est pas forcément pour tout le monde.

Pour remplir ses besoins en calcium les recommandations sont d’environ 200mg par jour, c’est assez facile à atteindre si l’on a une alimentation variée. A titre comparatif, il y a environ 120 mg de calcium pour 100g/100ml de lait, 86mg dans la graine de tournesol, noisette 123mg, lin 228 mg, amande 236, tahini 284, 80mg dans le tofu, chou 220, roquette 129, chou frisé cru 185 (72 cuit), chou vert cru 83, et dans les algues aussi: 1200mg dans la laitue de mer, 800 dans le kombu breton (laminaire).

Le lait de soja – ou boisson au soja, puisqu’il est désormais interdit de d’utiliser le mot « lait » pour les boissons végétales – ne contient en revanche que 12 mg de calcium. Elles sont parfois enrichies en calcium, pour remplir une fonction de lait au calcium. En effet, les graines de soja entières contiennent 220 mg de calcium mais le lait de soja contient environ 7 ou 8% de soja, il en va de même pour le yogurt de soja puisqu’il est fabriqué à partir de lait de soja. Une bonne raison de consommer du yogurt de soja n’est donc pas comme source de calcium, mais comme aliment frais, délicieux et probiotique, contenant des bactéries probiotiques comme dans yaourt de lait. Le lait et yogurt de soja contiennent autant de protéines que le lait et yogurt de vache. (Source des chiffres: CIQUAL 2016 – ANSES, https://ciqual.anses.fr/). Pour plus de détails, vous pouvez voir cet article sur les aliments riches en calcium et son tableau comparatif avec les produits laitiers.

Cela dit, vous pouvez utiliser ma recette pour faire du yogourt de lait de vache, l’avantage sera que vous réduirez le gaspillage de lait induit par les pertes des industries du yogourt. Faire son yogourt de vache soi-même est donc déjà une belle contribution!

A bientôt et bon appétit!