Plus hygiénique, plus écologique et doux pour la peau.

Et pourtant boudé ou oublié en Europe et en Occident.

Nous sommes une minorité sur terre à utiliser du PQ. Je voyage en Asie du sud est depuis plusieurs années et j’ai parfois passé des mois sans voir l’ombre d’un papier de toilette (PQ). En fait, si l’on y regarde de plus près, ou de plus loin en changeant de culture, nous sommes amenés à remettre en question l’utilisation de papier pour nous nettoyer aux toilettes.

Que l’on soit adeptes de l’eau ou du papier, on est tous convaincus d’avoir la meilleure pratique. Pourtant, en comparant rationnellement les deux, on peut constater que laver plutôt qu’essuyer, est plus hygiénique, plus doux pour la peau, et plus écologique.

Il y a une dizaine d’années, j’étais allée voir une exposition au musée d’ethnographie de Genève. Cette exposition, « Visages », présentait le point de vue de voyageurs venus de l’Est et découvrant les cultures occidentales. Je me souviens d’un texte qui m’avait, au départ, fait rire : un explorateur asiatique décrivait, horrifié, la saleté et la mauvaise hygiène des français qui « s’essuyaient les fesses avec du papier ». C’était les impressions de ce voyageur qui se lavait les fesses avec de l’eau depuis qu’il était né. Cette inversion m’avait beaucoup interpellée, car j’avais été moi même dégoûtée le jour où j’avais appris que les indiens se lavaient les fesses avec leur main et de l’eau. Toucher ses déjections, quelle abomination pour un occidental.

Laver ou essuyer, quel est le choix le plus hygiénique ?

De la manière la plus rationelle possible, comparons les avantages et les inconvénients.

Le PQ:

L’invention du papier de toilettes remonte au 6e siècle en Chine, mais le premier papier de toilette industriel aurait été inventé en 1857, puis commercialisé aux États-Unis. Avant cela, les occidentaux s’essuyaient avec ce qu’ils trouvaient : des feuilles d’arbres, des chiffons, du papier journal ou des annuaires, par exemple.

L’avantage principal du papier de toilettes est qu’il permet d’éviter de toucher ses matières fécales avec ses mains. Il peut arriver de se salir la main et là, on court se les laver.

L’autre avantage est que le papier est sec donc on évite de se mouiller ou de mouiller le sol de la salle de bain.

Les inconvénients sont par contre nombreux:

Le papier n’enlève pas tout, il reste nécessairement des résidus, notamment dans les pores et dans les poils. Cela représente un nid à bactéries et génère des mauvaises odeurs et parfois des infections.

Le papier n’est pas imperméable est peut donner l’illusion d’avoir les mains propres. Il faut donc se laver les mains avec précaution de toutes manières (à moins d’utiliser beaucoup de papier).

Le papier est irritant, ce qui favorise l’apparition d’hémorroïdes, de fistules, fissures anales et autres désagréments.

D’un point de vue écologique, le PQ est une catastrophe. Le papier de toilettes recyclé n’est pas leader du marché car les consommateurs veulent des produits plus doux (moins irritants). Ainsi, l’industrie du PQ coupe 27 000 arbres par jour. Que cela soit à partir de fibres recyclées ou  à partir d’arbres, la fabrication du PQ consomme des millions de litres d’eau, de l’énergie pour chauffer, des produits chimiques, notamment du chlore (250 000 tonnes pour les USA). Parallèlement le chlore génère de la dioxine, toxique pour l’environnement. Etapes de la fabrication du PQ (en anglais) Après utilisation, le PQ se retrouve dans les eaux usées, son traitement consomme alors encore de l’eau et de l’énergie.

Enfin, au niveau pratique, le papier peut boucher les toilettes, il faut aller l’acheter et le transporter depuis le magasin et surtout, il coûte cher.

Pour ces deux dernières raisons, économiques et écologiques, certains ont décidé d’abandonner le PQ. Mais, ignorant les avantages de se laver avec de l’eau, quelques uns ont adopté des solutions alternatives, tel que des chiffons lavables, une solution pas forcément écologique et qui complique la vie…

La méthode à l’eau:

L’Inde, l’Asie du sud est, le Japon ainsi que traditionnellement les musulmans, utilisent l’eau aux toilettes.

La technique la plus basique, telle qu’on la voit généralement en Indonésie par exemple,  ou encore dans les foyers modeste, à la campagne et dans les toilettes publiques de différents pays, consiste à avoir un bassin rempli d’eau et une petite casserole en plastique pour se verser l’eau sur la zone à nettoyer.

En Malaisie, un simple tuyau en plastique fixé à un robinet est souvent proposé. Enfin, en Thaïlande, on trouve en général des mini jets de douche très pratiques et reliés à un tuyau en inox. Il suffit d’une pression de la main pour que l’eau sorte, pas de robinet à ouvrir. Ce jet douche est aussi présent en Scandinavie. Avec ce système, il serait possible de ne pas se toucher pour se nettoyer.

Enfin, le Japon a inventé des toilettes high tech avec des mini jets automatiques.

Les avantages de l’eau sont que l’eau nettoie vraiment, ce qui évite également des maladies. Avant de sortir des toilettes, on se lave les mains, l’on est ainsi on est propres de haut en bas. Un voyageur Norvégien que j’ai croisé en Thaïlande m’avait bien résumé la question : « si tu as du caca sur ton tapis, ou sur toi, est-ce que tu vas le nettoyer avec de l’eau ou juste l’essuyer avec un tissu ou du papier ? ».

L’eau n’irrite pas la peau et la stimulation qu’elle offre permettrait de soulager la constipation. Pour ses nombreux avantages, l’eau, ou les lingettes humides, sont également utilisées chez les occidentaux pour l’hygiène des fesses de bébé, par les femmes durant leurs règles ou après l’accouchement, ou encore lors de maladies des organes génitaux tel que la candidose.

D’un point de vue écologique, lorsque l’on part en randonnée, emporter une bouteille d’eau plutôt qu’un rouleau de PQ, c’est éviter de jeter des matières polluantes dans la nature.

Au niveau pratique, la petite douchette est également utile pour rincer la lunette des toilettes ou la cuvette si on trouve les toilettes sales. Lorsque l’on utilise la méthode de l’eau, il est fréquent de mouiller le sol des toilettes, c’est l’occasion  de le laver régulièrement mais il faut pour cela avoir une bouche d’évacuation au sol.

Les inconvénients sont que l’eau peut être rare dans certains pays (à noter qu’un rouleau de PQ consommerait des centaines de litres d’eau pour sa fabrication, mais je n’ai pas trouvé les chiffres exacts). De plus, si l’eau est souillée, elle peut être vecteur de maladies.

L’eau mouille, évidemment, ce qui fait que l’on peut avoir les sous-vêtements humides, ce qui, en soit, n’est pas grave. Cela sèche vite, ou on peut se sécher avec une serviette ou un gant de toilette, comme cela se fait traditionnellement lors de l’usage du bidet en Italie par exemple.

Enfin l’inconvénient majeur est surtout la difficulté psychologique de toucher son pipi ou son caca. Le choix entre PQ ou eau peut se résumer à cette question : est-ce que je préfère avoir du caca sur les fesses ou sur la main ? Ou inversement, est-ce que je préfère avoir les fesses propres ou les mains propres ? Mais comme il est facile de se laver les mains juste après, et qu’il n’est même pas nécessaire de se toucher (nombreux sont ceux qui s’aspergent juste plus longtemps sans se toucher), nous n’avons en fait pas à choisir entre mains ou fesses. La vraie questions serait : est-ce que je préfère avoir les fesses légèrement sales jusqu’à ma prochaine douche, ou la main sale l’espace de quelques secondes avant de me les laver au savon ? Enfin, ce qui reste collé après un essuyage au PQ, finira bien par être touché avec les mains au moment de la douche!

Conclusion, la vraie barrière à l’adoption de l’eau par les occidentaux est certainement idéologique ou issue de la simple habitude.

Nous avons peut-être également un complexe de supériorité. En effet, si nous occidentaux utilisons du PQ, c’est que c’est  nécessairement mieux. On peut aussi penser que se laver avec de l’eau c’est pour les pauvres, ceux du tiers monde. Ce genre d’idées participe à faire que le PQ agrandit son marché en Asie du sud-est et en Inde, malgré les nombreux avantages hygiéniques et économiques de l’eau.

Malgré les avantages notables de l’eau, le PQ accroit son marché en Asie

Lors de mes voyages, j’ai souvent vu le PQ apparaître à coté du petit jet d’eau en Thaïlande. Cela crée des problèmes de toilettes bouchées car les tuyauteries ne sont pas adaptées, par conséquent, les thaïlandais utilisent des produits chimiques pour déboucher leurs toilettes, des produits qui se retrouvent souvent dans les rivières ou dans la mer, notamment sur les îles « paradisiaques » qui n’ont pas de système de gestion des eaux usées. Le même sort est réservé au PQ dans les nombreux lieux qui n’ont pas de système de gestion des des déchets.

Durant mes séjours en Asie, je me suis mise au jet d’eau. Pour une genevoise, on pourrait dire que c’était prédestiné. Je ne me suis jamais sentie aussi propre. Lorsque je rentrais en Suisse, cela me faisait bizarre, je me sentais comme cet explorateur asiatique qui m’avait fait tant rire au départ. Je ne pouvais m’empêcher de penser aux résidus qui restaient nécessairement après le passage du pauvre PQ tout sec. Pour ne pas irriter ma peau, et comme il n’y a pas d’installation pratique avec de l’eau à coté des toilettes helvètes, j’étais tentée de prendre une mini douche juste après.

Cela me rappelle aussi mon ancienne colocatrice en Italie qui était adepte du bidet, invention encore très présente en Italie. Elle rentrait tous les soirs en courant aux toilettes et en criant « mi scappa la pipi ! ». Elle avait l’habitude de se laver avec de l’eau et refusait d’utiliser les toilettes publiques qui ne sont pas équipées de bidet. Cela me faisait rire à l’époque.

Après quelques mois de retour en Suisse, je me suis réhabituée au fameux PQ. Pourtant, deux parties de moi étaient toujours réticentes, la partie écologique et la partie confort de me sentir plus propre et sans frottement de papier. Mais sans douchette la tâche restait compliquée. Puis, je me suis souvenue d’un ami du sud de la France qui utilisait une bouteille d’eau pour faire ses besoins dans la nature. A défaut d’avoir pu installer une douchette wc, j’ai désormais ma bouteille d’eau toujours disponible à côté des toilettes!

Finalement, tout est question d’expérience et d’habitude.

A vous de jouer si vous le souhaitez:

Il est possible d’installer un mini jet chez soi, en le commandant sur internet ou en le ramenant dans ses bagages au retour d’un voyage en Asie (ces installations sont faciles à trouver dans les magasins et coûtent environ 10 dollars).

Plus basique, une petite bouteille d’eau est utile chez soi ou pour emmener avec soi et permet de se nettoyer facilement. Il est également possible de créer des toilettes à l’indonésienne, en installant à côté des toilettes un baquet rempli d’eau et un grand gobelet posé à la surface. Ajouter une bouche d’évacuation d’eau au sol serait idéal.

Pour les écolos des toilettes, avec un peu d’adaptation, le système de la douchette wc devrait aussi pouvoir s’utiliser avec des toilettes sèches, que l’on renommera pour l’occasion: toilettes compost.

Ainsi, nous pourrons participer pleinement au cycle naturel dans ce domaine de notre vie.